samedi 31 août 2013

WILFREDO LAM (1902-1982) VI

 
 
 
WILFREDO LAM-1937 La Guerra civil



Alors que Lam et ses amis fêtent, en février 1936, la victoire du Frente popular et sa vague de réformes sociales, l’inspiration du peintre poursuit sa crise. Mais la peinture devient pour lui secondaire quand advient le soulèvement militaire antirépublicain du 18 juillet. C’est le début de la guerre civile. En trois jours, un tiers du pays est conquis par les partisans de Franco, mais Madrid et Barcelone résistent.
Tandis qu’il apprend l’assassinat de Lorca à Grenade ou la révocation de Neruda, d’autres arrivent pour soutenir les républicains, comme Carl Einstein qui rejoint la colonne Durutti, ou Pablo de La Torriente Brau, le correspondant de guerre cubain qui va trouver la mort en décembre.
Lam et ses amis s’engagent dans la lutte. À l’instar de Mario Carreño, il réalise des affiches à la gloire des républicains commandées par le ministère de la propagande. Puis, il participe à la défense de la ville assiégée à partir de novembre. Mais il faut avant tout fabriquer des munitions. Son ami chimiste Faustino Cordón l’engage dans une usine d’armement et lui confie un poste où le peintre assemble des bombes anti-chars.

Après six mois de travail intensif, Lam est intoxiqué par les produits qu’il a manipulés. En mars 1937, il doit être envoyé en convalescence au sanatorium de Caldes de Montbui, au nord de Barcelone. Sur le chemin de la Catalogne, il fait une étape à Valence où il rencontre Pérez Rubio et Joseph Renan. Ce dernier, directeur des Beaux-Arts, lui commande un tableau sur la guerre afin de l’envoyer au pavillon espagnol de l’Exposition internationale de Paris. Une commande qu’il réalisera trop tard pour être exposée : La Guerra civil. Il passe par Barcelone en mai au moment où les anarchistes du POUM sont sacrifiés par les représentants du PC.



WILFREDO LAM (1902-1982) V

 
 
 
WILFREDO LAM-1934 AUTOPORTRAIT

WILFREDO LAM (1902-1982) IV

 

 
WILFREDO LAM-1935 La Ventana, II
 
 
 
 
WILFREDO LAM-1938 Femme dans un intérieur
 
 
 
 


ROB GONSALVES (NE EN 1959) II

 
 
 
 

 
 

 
 

 
 
 
 

ROB GONSALVES (NE EN 1959) I

 
 
 
 
 
Rob Gonsalves est né en 1959 à Toronto. Il est peintre d'un courant artistique nommé le réalisme magique.

Il a gagné en 2005 le prix Governor General's Award dans la catégorie littérature pour enfants, illustration pour son œuvre Imagine a Day.

Après avoir découvert Dalí et Tanguy, Gonsalves a commencé ses premières peintures surréalistes. L'approche du «réalisme magique» de Magritte et les illusions de perspective précise de Escher on été une grande influence dans son travail .

Bien que le travail de Gonsalves soit souvent classé comme surréaliste, il diffère parce que les images sont délibérément planifiées et le résultat de la pensée consciente. Les idées sont en grande partie générées par le monde extérieur et impliquent des activités humaines reconnaissables, utilisant des dispositifs illusionnistes soigneusement planifiées.
Gonsalves apporte une touche de magie dans des scènes réalistes. Il consacre une notable part de son temps à planifier chaque pièce afin de rendre les transitions impeccables et termine habituellement environ quatre tableaux chaque année.
 
 
 
 

vendredi 30 août 2013

LE PROVERBE DU JOUR

 
 
 
ALAIN CHESNEAU-DANSE
 
 
15. La danse règne sur le bois blanc.

Paul ELUARD, 152 proverbes mis au goût du jour en 
collaboration avec Benjamin Péret, 1925

FRIDA KAHLO (1907-1954) IX

 
 
 
Frida Kahlo-1929 AUTOPORTRAIT
 
 
 
 

MONTPELLIER : Manuel Ocampo au Carré Sainte-Anne

 
 
 
MANUEL OCAMPO-2011 Untitled (From The Series Spermicidal Holocaust and Eggyolk Exorcism)
 
 
Manuel Ocampo est un artiste philippin à la peinture pleine de couleurs, entre anarchie et surréalisme, avec des références à la BD, aux arts populaires, aux ex-voto, à l'iconographie chrétienne.
 
« Manuel Ocampo est originaire des Philippines. Il a vécu à Manille, Los Angeles, Rome et Séville. Il est imprégné de la culture du catholicisme et de celle des chewing-gums, du Marxisme et de Mickey Mouse, et le choc que subit le spectateur face à ses images, pourrait correspondre au choc culturel qu’a vécu Ocampo. [...] Dans ses tableaux, les grands - les plus grands - symboles sont réunis dans un spectacle grotesque. [...] Il dépeint les plus grands accomplissements de la civilisation comme une hypocrisie et nous présente le chaos tel un état psychique collectif. [...] Ses scénarii sont des apocalypses devenues images : des scènes extrêmes pleines de violence, de décadence, de blasphème, qui illustrent les méthodes de torture des seigneurs colonialistes espagnols ainsi que les insignes du Heavy Metal ou la typologie des films du genre gore. [...] Il ignore avec nonchalance toute limite, que ce soit celle entre la peinture et la sculpture, ou celle entre la culture savante et l’art trivial. »
 
(Sandra Danicke)


Carré Sainte-Anne

Espace d’art contemporain de la Ville de Montpellier
2 rue Philippy – 34000 Montpellier
Tél. : 04 67 60 82 11

Ouvert du mardi au dimanche de 11h à 13h et de 14h à 19h
Entrée libre
Visites commentées proposées par l'équipe de médiation
- rendez-vous les jeudis à 16h, et tous les dimanches à 11h, 14h30 et 16h



Rencontres d'Arles 2013 : Untouched, Guy Bourdin.

 
 
Guy Bourdin-1950 55 Paris après-guerre
 
 
 
Avant la couleur, Guy Bourdin s'épanouit dans l'ombre
 
 
"Vu le thème choisi par les Rencontres d'Arles cette année – le noir et blanc –, la présence de Guy Bourdin a de quoi surprendre. Après tout, le photographe de mode à l'humour grinçant (1928-1991) est avant tout connu comme un coloriste. Pour ses images construites comme des scénarios de films noirs, il a donné au vernis à ongles l'apparence du sang, il a inventé des crimes cachés derrière des piscines trop bleues pour être honnêtes. Pourtant, l'univers du photographe est tout aussi prenant et troublant dans ses images en noir et blanc : c'est ce dont convainc sans peine la commissaire Shelly Verthime, qui travaille avec le fils du photographe sur ses archives depuis plus de douze ans. D'ailleurs, celle-ci remarque : "La moitié des images de Bourdin pour le magazine Vogue ont été faites en noir et blanc."
 
 
Ce qui pourrait n'être qu'un fond d'atelier sans intérêt dévoile les préoccupations profondes de l'artiste, avant ou au-delà de son travail de mode - il se destinait au départ à la peinture. Dans les années 1950, alors que l'école humaniste (Willy Ronis, Edouard Boubat...) saisit l'envie de vivre qui caractérise l'après-guerre, Guy Bourdin montre au contraire des visions troubles : enfants cachés dans des renfoncements sombres ou des rues étroites, sols qui se dérobent sous les pieds, passants l'air absorbé ou inquiet. Un garçon en béret regarde un kiosque qui demande : "A quel âge la majorité sexuelle ?"

INFLUENCE DE MAN RAY

Chez Bourdin, le surréalisme n'est jamais loin. Dans les inscriptions sur les murs, ou chez ce baigneur photographié aux bains Deligny : il a des cicatrices en forme d'ouïes, à la façon de Kiki transformée en violon par Man Ray – le photographe surréaliste fut d'ailleurs un ami de Bourdin. On retrouve ces influences dans la première image de mode publiée par Bourdin dans Vogue en 1955 – en noir et blanc –, qui ouvre l'exposition : un mannequin très chic encadré par trois têtes de veau, les yeux fermés et la langue qui pend. Bourdin avait photographié son modèle devant l'étal d'une boucherie, avant de recadrer la photo, supprimant une grande partie du contexte pour rendre l'image plus abstraite et inquiétante. Pour l'époque, ce mélange de chic et de morbide était osé.

Pour accompagner les petites images d'archives, la commissaire a aussi ressorti des portraits méconnus du début de carrière de Bourdin, réalisés pour le magazine Nouveau Femina. Des images déjà radicales : à chaque fois, c'est le lieu qui l'emporte sur le personnage, souvent rejeté dans un coin de l'image, comme enfermé dans la photo. Le sculpteur César est ainsi dévoré par ses œuvres. Même lorsqu'il photographie sa femme, Guy Bourdin la noie dans le cadre : il aime avant tout les murs lépreux et les maisons abandonnées, et enferme les enfants dans des cages. C'est cet univers sombre et déroutant qu'il va transposer dans son travail de mode, transformant les rouges à ongles et les chaussures à talons en armes menaçantes.

En contrepoint des images méconnues de Bourdin, la commissaire présente aussi quelques Polaroid noir et blanc plus familiers, que Bourdin a pris tout au long de sa carrière : ils lui servaient de pense-bête lors des shootings, de brouillon ou de journal intime. Il y déploie l'étendue de son registre – des ambiances urbaines, des bâtiments industriels y côtoient les jeux de jambes de mannequins. Tout le vocabulaire de Bourdin est déjà là, en noir et blanc : des grillages, des reflets doubles, des fenêtres qui donnent sur le vide. Et toujours des portes ouvertes sur des histoires à inventer."


Par

LE MONDE |

Le Surréalisme et l'objet, exposition au Centre Pompidou. Du mercredi 30 octobre 2013 au lundi 3 mars 2014. II



Pour revenir sur l'annonce de cette exposition dont j'avais parlé il y a quelques temps voici le lien qui renvoie à la notice du Centre Pompidou et que j'avais omis de donner me semble-t-il :

http://www.centrepompidou.fr/cpv/ressource.action?param.id=FR_R-1a7ad35ca66db867c9bdda2c107c7dda&param.idSource=FR_E-1a7ad35ca66db867c9bdda2c107c7dda



Bonne journée à tous .



 
Ji Lee (HOMMAGE A MARCEL DUCHAMP)
 
 
 
 

mercredi 28 août 2013

MAX ERNST / LA FEMME CENT TETES (1929) IV

 
 
 
 

 
 

 
 

 
 

 
 
 
 

 
 

 
 

 
 
 
 

DANS LA RUE I

 
 
 
A l'abri sous mon parapluie. Exposition COLLAGES, sept. 2011. Piscine Jean Mermoz ( Lyon 8e arrondissement)
 
 

 
Curieux attelage ; Exposition COLLAGES, sept. 2011. Mermoz (8e arrondissement)
 
 

 
Dragon & l'enfant ; Exposition COLLAGES, sept. 2011. Mermoz (8e arrondissement)
 
 
 
Mélange de photographie et d’illustration, les grands collages des quatre artistes du Bocal participant à cette exposition (Delphine Perret, Matthieu Perret, Lucie Albon et Tian) ont habillé quelques pans de murs de ce quartier en pleine réhabilitation afin de transformer l’espace urbain en espace d’exposition à ciel ouvert.

Photos / Gaël Dadies
http://artderuelyon.wordpress.com/

LUKAS KANDL (NE EN 1944) i

 
 
 
 

 
 

 
 

 
 

 
 

 
 

 
 

 
 
 
 

LUKAS KANDL (NE EN 1944)

 
 
 
 
 
Né en 1944, à Prague, (République Tchèque), Lukáš Kándl a étudié à l'Ecole des Arts Appliqués de Prague entre 1959 et 1963. Il a poursuivi à l'Ecole Supérieure des Arts et Métiers de Prague, s'est spécialisé dans le dessin, la peinture et l'anatomie, et a obtenu, en 1969, le Diplôme d'Etat de l'Académie des Beaux Arts de Prague.

Il s'est installé à Paris en 1970, et, en 1975, a obtenu la naturalisation française. Entre 1977 et 1980, il a effectué un séjour d'étude en Hollande. Son atelier est actuellement situé en Bourgogne.

Il est le chef du groupe visionirique étrange du Salon Comparaisons depuis 2002. Chaque année il impose à son groupe un thème et un format pour l'exposition "Art en capital" qui a lieu au Grand Palais à Paris. (L'Ange exquis 2006, Exclamations! 2007, la Divine Comédie 2008, ...)
Chef de file du mouvement Magique Réalisme en France , il rassemble autour de lui les meilleurs artistes français et étrangers de ce mouvement au sein du groupe Libellule. Il lance alors l’immense projet de «L’Ange Exquis», exposition monumentale et internationale, offrant au public un panorama de la peinture fantastique contemporaine avec des artistes du monde entier.

Lukáš KÁNDL est également sculpteur et affichiste. Lauréat en 1985 du concours d'affiches du Trophée Lancôme, il a été l’affichiste officiel de la Fête du Livre de Saint Etienne (France) pendant 16 ans, créant une collection d'affiches qui ont rencontré un large succès.


“Ma peinture se situe quelque part entre le surréalisme et le fantastique, un mélange entre l’étrange et l’imaginaire. J’aime penser que, dans une autre vie, je vivais à Prague comme quelqu’un en charge de la fabuleuse collection de Rudolf II dans laquelle on trouvait, entre autres, des instruments d’astrologie, des potions pour fabriquer de l’or, la pierre philosophale, des manuscrits hermétiques renfermant des formules au VITRIOL. Il y avait aussi des animaux étranges que j’affectionne tout particulièrement.”
 
 
 
 

 
LUKAS KANDL PHOTO KAREL STEINER
 
 
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ENTRETIEN REALISE POUR RADIO PRAHA
 Anna Kubišta
25-05-2008
 
 
"Lukáš Kándl vit aujourd’hui avec sa femme dans la belle région de Bourgogne, mais il revient de temps à autres dans sa ville natale, source d’inspiration originelle pour sa création. Car Lukáš Kándl peint des tableaux où le fantastique et le merveilleux le disputent à l’inquiétant et l’onirique. Dans la veine de Bosch ou d’Arcimboldo, on n’est jamais loin du conte ou du rêve dans le monde de Lukáš Kándl. Le père de Lukáš Kándl était caricaturiste, je lui ai donc demandé s’il fallait y voir une première impulsion à se tourner vers les arts et la peinture...
 
« Oui, on peut dire que ça venait de là… Mais il était en même temps caricaturiste et architecte. Finalement, les enfants, c’est-à-dire mon frère et ma sœur sont devenus architectes. Moi, j’étais la seule brebis galeuse qui a fini par faire des études artistiques en peinture, sculpture et dessin. »
 
Vous êtes parti de Tchécoslovaquie en 1970 pour la France. Pourquoi êtes-vous parti ? On suppose qu’il y a des raisons historiques et politiques aussi…

 « Au départ, elles n’étaient même pas de cette nature. Il y avait eu une rencontre d’architectes à Prague, à laquelle participait mon père. L’un des architectes venait de France et m’a trouvé un stage d’été en Bretagne. Je suis parti pour les vacances pour commencer le français et gagner un peu d’argent. C’est là où j’ai rencontré ma femme Françoise. On a fini par se marier, et parce que je n’avais pas fini mes études, nous sommes venus à Prague et c’est seulement après mes études qu’on a quitté la Tchécoslovaquie pour Paris, pour commencer la vie artistique et la vie tout court. »

Ça ne doit pas être facile quand on débarque de Tchécoslovaquie, en tant que jeune artiste qui commence sa carrière…

« Absolument pas. Le domaine artistique, c’est une vie totalement aléatoire. D’autant plus que les premiers six mois à Paris, je me suis dit qu’il fallait aller visiter les galeries pour se faire connaître, mais je me suis aperçu que les galeries se fichaient complètement de ma vie artistique. J’ai commencé à travailler de mon côté. Par la suite, c’est plutôt dans les salons parisiens que j’ai commencé à exposer. Ils étaient visités par les galeristes, et c’est là que j’ai commencé à être contacté progressivement. »

Qu’est-ce qui explique selon vous cette méfiance ? Les galeristes sont-ils par définition méfiants ou est-ce à cause de votre style artistique qui n’est pas très courant. Vous faites de l’art fantastique…

 « Je crois que ce n’était pas tout à fait cela à l’époque. Je pense que c’était plus le fait que les galeries avaient déjà leur artiste. Parfois ils disaient que ce n’était pas tout à fait leur style. Mais c’était surtout qu’ils attendaient certaines preuves qu’on continue réellement, certains artistes fonctionnaient de façon aléatoire. Ils voulaient donc voir si tel ou tel artiste continuait de façon assidue son travail. »

On parle de votre style. On pourrait le caractériser comme de l’art fantastique. Cette définition est-elle la vôtre ?

 « Oui, on peut dire cela. Il y a plusieurs définitions… On peut parler aussi d’art onirique, on peut parler de réalisme magique etc. Mais il est vrai que l’inspiration a un rapport avec la littérature, avec la poésie, ou même avec les sujets bibliques ou ésotériques. Donc on peut parler d’une certaine façon de surréalisme parce qu’il y a là aussi un lien avec la littérature. »

Qu’est-ce qui vous fascine et qu’est-ce que vous trouvez dans cet ésotérisme et ces symboles que vous représentez ?

« Moi j’aime bien les tableaux qui ont un contenu. Parfois c’est un contenu au premier degré parce qu’on voit juste les personnages, les objets, les animaux. Mais ils peuvent être dans une situation qui peut sembler étrange, qui peut être tirée d’un rêve ou quelque chose et finalement le tableau trouve ainsi un deuxième degré. J’aime bien cette superposition de la réalité et du rêve qui permet au spectateur aussi de trouver son propre cheminement. J’ai souvent voulu dire quelque chose dans mes tableaux et le spectateur trouve souvent quelque chose de semblable, mais parfois aussi quelque chose de complètement différent – selon son vécu, ses études, ses références littéraires, spirituelles ou autres… »

Pensez-vous alors que l’art d’aujourd’hui est vide de sens ?

 « Oui, pour être tout à fait honnête, j’ai l’impression que l’art actuel ou l’art conceptuel manque de spiritualité. Je pense qu’il faut se référer à l’époque où les gens bâtissaient des cathédrales, où on faisait les choses au nom d’une spiritualité. J’ai l’impression que l’art était plus littéraire, plus philosophique, plus puissant, plus croyant si l’on peut dire. Je trouve que ça apportait plus que simplement l’art pour l’art. Le côté conceptuel me semble un peu court. »

Si on résume rapidement, on peut faire une distinction, selon vous, entre un art qui serait plutôt un art conceptuel qui serait plutôt de la consommation et une autre forme d’art qui pousserait plus à la méditation…

 « Oui, je le pense sincèrement. D’autant plus qu’il me semble que dans l’art conceptuel, il y a beaucoup de personnes qui en sont capables. Pour l’art, disons, réaliste ou même surréalisme ou visionnaire, on a besoin d’une technicité dite ‘à l’ancienne’ qui ne se pratique plus. Parfois, je dis que si d’un coup on changeait le métier de certains artistes, qu’on déclarait qu’ils sont chirurgiens, je pense qu’il y aurait beaucoup de cadavres. »

Dans ce monde de l’art conceptuel, quel est alors la place de l’art fantastique ? On a l’impression qu’il n’est pas du tout visible ou en tout cas difficilement, et qu’il faut aller le chercher.

 « C’est vrai que ce n’est pas un art actuel ou accepté comme tel. N’empêche qu’on s’est aperçu dans différentes expositions que le public est beaucoup plus intéressé parce qu’il en a assez de cet art qui ne raconte pas grand’chose... »

Vous avez quand même des ‘partenaires’ dans cet art fantastique : je pensais à la bande dessinée qui a quand même recours à l’imaginaire et à une imagerie très riche...

 « Evidemment, il y a en effet la bande dessinée où certains artistes vont dans la direction d’un art visionnaire... Dans la bande dessinée, il y a des artistes absolument formidables... »

Dans ce monde de l’art conceptuel, quel est alors la place de l’art fantastique ? On a l’impression qu’il n’est pas du tout visible ou en tout cas difficilement, et qu’il faut aller le chercher.

 « C’est vrai que ce n’est pas un art actuel ou accepté comme tel. N’empêche qu’on s’est aperçu dans différentes expositions que le public est beaucoup plus intéressé parce qu’il en a assez de cet art qui ne raconte pas grand’chose... »

Vous avez quand même des ‘partenaires’ dans cet art fantastique : je pensais à la bande dessinée qui a quand même recours à l’imaginaire et à une imagerie très riche...

 « Evidemment, il y a en effet la bande dessinée où certains artistes vont dans la direction d’un art visionnaire... Dans la bande dessinée, il y a des artistes absolument formidables... »

J’aurais aimé pour finir que vous me parliez pour finir du projet ‘Ange Exquis’...

 « Ange Exquis c’est un projet collectif : en 2010 on va exposer au Clementinum, avec un groupe d’artistes qui travaille dans un monde semblable au mien, mais qui viennent de toute l’Europe. L’idée a germé quand j’étais à Cannes en 2004. J’avais été invité avec cinq autres artistes pour réaliser le jeu surréaliste, des cadavres exquis. Ca consistait à étaler une toile de vingt mètres de long et deux mètres de large. On était séparé par des rideaux et chaque artiste faisait quatre mètre sur deux sur la même toile. On avait seulement une journée pour le faire, donc ça n’a été qu’un dessin préparatoire, en une journée vous ne pouvez pas tout finir. J’étais frustré c’est pourquoi j’ai fait appel à quelques artiste que je connais, qui travaillent dans le même esprit, j’ai dit qu’on allait travailler sur un même format, sur une même thématique, chaque artiste pouvant travailler dans son atelier de façon assez longue. Au lieu de l’appeler cadavre exquis, on l’a débaptisé pour l’appeler ‘Ange exquis’ par référence à un poème de Jacques Prévert.» "








MAN RAY (1890-1976) I

 
 
 
MAN RAY-1913 Still-Life with Red Tea Kettle
 
 

 
Man Ray-1916 Ballet sillhouette
 
 
 
 

mardi 27 août 2013

MAN RAY (1890-1976)

 
 
« Je photographie ce que je ne désire pas peindre, et je peins ce que je ne peux pas photographier.  »
 
 
 
 
 
Man Ray jeune par Alfred Stieglitz
 
 

 
Man Ray with photokina-Auge, photokina 1960 -par Charles Fraser
 
 
 
Man Ray, né Emmanuel Rudzitsky, le 27 août 1890, à Philadelphie, États-Unis, mort le 18 novembre 1976, à Paris, France, est un peintre, photographe et réalisateur de films, acteur du dadaïsme à New York, puis du surréalisme à Paris.Sa carrière commence à New York. Avec son ami proche Marcel Duchamp, ils forment la branche américaine du mouvement Dada. Après quelques expériences artistiques infructueuses, et notamment une publication sur le Dada new-yorkais en 1920, Man Ray conclut que « Dada ne peut pas vivre à New York ». Le 14 juillet 1921 Man Ray débarque au Havre (Seine-Maritime), puis arrive à Paris, à la gare St-Lazare où Marcel Duchamp l'accueille. Le soir même, il est présenté aux surréalistes Louis Aragon, André Breton, Paul Éluard et Gala, Théodore Fraenkel, Jacques Rigaut et Philippe Soupault. Il s'installe dans le quartier du Montparnasse, rencontre et tombe amoureux de la chanteuse française et modèle Kiki de Montparnasse. Il rencontre également le couturier Paul Poiret. Il réalise de nombreuses photos de mode qui sont publiées dans les magazines et contribuent à le faire connaître. À son grand regret, il n'aura jamais l'occasion de faire le portrait du couturier. Dans son livre de souvenirs, il confie qu'à la mort de Paul Poiret, il a envoyé à un journal une photo du médecin personnel du couturier comme étant un portrait de Poiret et cette photo a été publiée comme telle. Avec Jean Arp, Max Ernst, André Masson, Joan Miró et Pablo Picasso, il présente ses œuvres à la première exposition surréaliste de la galerie Pierre à Paris en 1925. Ami de Marie-Laure de Noailles et de Charles Vicomte de Noailles, il tourne en 1928 à Hyères à la Villa Noailles son troisième film Les Mystères du château de Dé. À Montparnasse, durant trente ans, Man Ray révolutionne l'art photographique. Les grands artistes de son temps posent sous son objectif, comme James Joyce, Gertrude Stein ou Jean Cocteau. Il contribue à valoriser l'œuvre d'Eugène Atget qu'il fait découvrir aux surréalistes et à son assistante Berenice Abbott. En 1934, Meret Oppenheim pose pour Man Ray, cette série de photos de nus devient l'une de ses séries les plus célèbres. En 1940, après la défaite de la France, Man Ray parvient à rejoindre Lisbonne et s'embarque pour les États-Unis en compagnie de Salvador et Gala Dalí et du cinéaste René Clair. Après quelques jours passés à New York, il gagne la côte ouest avec le projet de quitter le pays pour Tahiti où il resterait quelques années. Arrivé à Hollywood, il reçoit des propositions d'exposition, rencontre une femme, Juliet, et décide de se remettre à peindre. Il devient Satrape du Collège de 'Pataphysique en 1963.Inhumé au cimetière du Montparnasse (7e division), on peut lire sur sa tombe son épitaphe : « Unconcerned, but not indifferent » (« Détaché, mais pas indifférent »).

HISTOIRE SECRETE D'UNE VENTE SURREALISTE (L'ATELIER D'ANDRE BRETON AVRIL 2003)

 
 
 
42 RUE FONTAINE L'ATELIER D'ANDRE BRETON (photographie de Gilles Ehrmann, 2003)
 
 
 
De 1922 à sa mort, en 1966, le fondateur du surréalisme avait accumulé des trésors dans son appartement parisien. Sa veuve, Elisa, rêvait d'une fondation. Les sommités de l'Etat ont promis leur aide. De riches collectionneurs ont offert des sommes folles. Aujourd'hui, sa fille, Aube, s'apprête à tout disperser aux enchères. Comment en est-on arrivé là?


En ce jour d'hiver de 1989, la voiture de François Mitterrand s'arrête devant le 42, rue Fontaine, à deux pas de la place Blanche et du Moulin-Rouge. Les gardes du corps se postent discrètement dans le minuscule escalier. Le président s'engouffre dans le long couloir, traverse une cour sombre et monte au "deuxième étage et demi", où André Breton a vécu de 1922 jusqu'à sa mort, à 70 ans, en 1966. Quand la porte s'ouvre, François Mitterrand est projeté dans un atelier féerique: une toile de Miro voisine avec une collection de moules à gaufre, un masque esquimau avec les oeuvres complètes de Trotski (dédicacées, bien sûr), un nu de Magritte avec des bénitiers du XVIIIe siècle, un fétiche de Nouvelle-Guinée avec une photographie en noir et blanc de Man Ray.

C'est Elisa, la dernière épouse du poète, qui accueille Mitterrand. Cette très discrète visite présidentielle constitue l'ultime tentative de sauver cet atelier unique au monde. Elisa Breton rêve d'un musée, d'une fondation. Le président, qui goûte plus la longue phrase provinciale de Chardonne que les fantaisies surréalistes, s'attarde peu sur les rayons de la bibliothèque. En revanche, son oeil est attiré par un portrait d'Elisa, photographiée aux Etats-Unis dans les années 1940. Plus don Juan que jamais, le président s'extasie sur les traits de la jeune femme. Puis, un peu dérouté par cet appartement qui tient autant du musée dada que du cabinet de curiosités, il prend congé. Il ne donnera jamais suite. Le 9 novembre 1988, d'anciens surréalistes proches de Breton lui avaient fait parvenir un dossier complet sur les richesses du 42, rue Fontaine, via Béatrice Marre, son chef de cabinet. Eux aussi se sont heurtés à un silence poli. Le "Palais idéal du surréalisme" auquel ils rêvent ne verra jamais le jour.

Quinze ans plus tard, Elisa disparue, le musée Breton toujours au point mort, Aube, la fille du poète, a dû se résoudre à une douloureuse extrémité: la dispersion totale des trésors de la collection André Breton, pour ce qui s'annonce déjà comme la plus incroyable vente aux enchères jamais organisée à Paris. Du 1er au 18 avril, l'hôtel Drouot va se transformer en temple du surréalisme: 4 100 lots - comprenant 3 500 livres, 800 manuscrits, 1 500 photographies, 400 tableaux et dessins... - exposés dans 9 salles, 22 sessions de vente organisées en duplex dans deux grands espaces pouvant accueillir 1 000 amateurs, une trentaine de téléphones pour relayer les enchères venues du monde entier, un catalogue en 8 volumes et un produit total prudemment évalué à 30 millions d'euros...

Aucun détail n'a été négligé par les commissaires-priseurs, Mes Laurence Calmels et Cyrille Cohen, assistés d'une équipe d'une vingtaine de personnes et, surtout, de neufs experts plongés depuis des mois dans les trésors du 42, rue Fontaine: les murs de la salle de bains de Breton, tapissés d'une centaine de bénitiers, seront reconstitués à Drouot; certaines ventes de photographies auront lieu en nocturne à Paris, afin que les riches collectionneurs américains de la côte Ouest puissent surenchérir (nombre d'artistes, tels Madonna, Tom Hanks ou Elton John, pourraient être intéressés); enfin, un DVD rassemblant 25 000 clichés - la moindre dédicace au dos d'un tableau ou annotation de la main de Breton dans un livre y figurent - proposera aux amateurs une visite virtuelle de l'atelier du père du surréalisme (1).

Le rêve d'un musée impossible. Mais, au-delà de cette dimension hollywoodienne, c'est évidemment la richesse unique des pièces présentées qui stupéfie (voir ci-contre). Collectionneurs et musées vont se disputer Le Piège, de Miro (estimation: de 3 à 5 millions d'euros), La Femme cachée, de Magritte (de 500 000 à 800 000 euros), un portrait de Duchamp par Man Ray (25 000 euros) ou le manuscrit d'Arcane 17, signé Breton (texte à droite, objets glanés par l'auteur à gauche, sous reliure en peau de morue beige, 150 000 euros). Les amoureux de l'aventure surréaliste devraient s'arracher revues (une collection complète de Littérature pour 25 000 euros), tracts, comptes rendus de rêves et cadavres exquis griffonnés par Eluard, Desnos ou Dali, et méticuleusement conservés dans des cartons sur les étagères de l'atelier. Enfin, les amateurs de curiosités se disputeront le thème astral de Rimbaud dressé par Breton, sa boule de voyante, sa collection de moules à hosties, une boîte de papillons et même une carapace de pangolin...

Mais cette dispersion à l'encan d'un pan essentiel de la vie artistique du XXe siècle n'est pas du goût de tout le monde. Une pétition circule sur le Net pour déplorer cette vente qui marque la fin brutale du magique atelier de la rue Fontaine. "L'appartement de Breton était une oeuvre d'art en soi, qui valait par ses juxtapositions surprenantes, son savant désordre, son esprit unique au monde", soupirent les signataires. "Bien sûr, dans ces 80 mètres carrés envahis par des milliers d'objets, on aurait peut-être pu créer un musée à la Raymond Roussel, réservé à un seul visiteur à la fois", ironise Jean-Michel Goutier, ancien surréaliste proche de Breton puis de sa fille, Aube. Difficulté supplémentaire: Breton n'était que locataire de cet appartement. Or, il y a quelques années, le propriétaire a fait fracturer la porte en présence d'un huissier pour constater qu'il était inoccupé, Elisa l'ayant quitté en 1991. Masques esquimaux inestimables, toiles de Picabia, manuscrits de Desnos et toutes ces pièces patiemment amassées au fil de décennies auraient pu se volatiliser, si la gardienne n'avait appelé à la rescousse Jean-Michel Goutier. Le bail "loi de 48" fut revu à la hausse, le propriétaire, calmé. Mais qui savait que derrière la banale porte d'un appartement inhabité du quartier de Pigalle se cachait une fabuleuse collection, aujourd'hui évaluée à 200 millions de francs? Tout juste Elisa avait-elle veillé à effacer le nom d'André Breton sur la sonnette...

Faute de ce musée impossible, Elisa et Aube Breton ont longtemps rêvé d'une fondation qui accueillerait les archives de la rue Fontaine. Aidées par d'anciens surréalistes regroupés dans l'association Actual, présidée par l'écrivain Jean Schuster, elles ont multiplié les démarches auprès des pouvoirs publics. Au début des années 1980, les deux femmes ont trouvé un partisan inattendu de la révolution surréaliste en la personne du... ministre de l'Intérieur, Gaston Defferre. Dans sa jeunesse, le maire de Marseille s'était en effet entiché de Breton, de Dali et d'Aragon, au point qu'après sa mort, en ouvrant son coffre à la banque, on eut la surprise d'y découvrir deux numéros de La Révolution surréaliste. Le ministre de François Mitterrand a notamment permis à Actual de bénéficier de subventions de l'UAP. De son côté, Roland Dumas appuyait les demandes de crédit auprès du ministère de la Culture. Jack Lang s'est d'ailleurs déplacé en personne au 42, rue Fontaine. "Tout ceci doit rester dans notre patrimoine!" s'est-il écrié, enthousiaste comme à son habitude. Le virevoltant ministre a promis l'appui de l'Etat. Sans grand résultat concret. On comprend la stupéfaction des proches de Breton lorsqu'ils découvrirent que Lang avait écrit personnellement à son successeur à la Culture, Jean-Jacques Aillagon, le 10 février, pour le mettre solennellement en garde: "Vous ne pouvez pas laisser faire cela" ...

De nombreuses propositions de rachats chaque année. Dès lors, les pouvoirs publics ayant abdiqué, collectionneurs privés et institutions étrangères entrent en scène. "La pression était énorme, nous étions dans une citadelle assiégée", se souvient Jean-Michel Goutier. Ainsi, chaque année, l'honorable représentant du Harry Ransom Humanities Research Center de l'université d'Austin, au Texas, invite Elisa dans un grand restaurant parisien. Chaque année, au moment du café, l'Américain propose de racheter la totalité des archives d'André Breton. Et, chaque année, Elisa refuse. Elle ne peut imaginer ces témoins uniques de l'aventure surréaliste atterrir au Texas, si loin du Paris célébré par Aragon, Eluard et Tanguy.
Mais des amateurs français se manifestent également. Daniel Filipacchi, le célèbre propriétaire de Paris Match, qui passe pour l'un des plus grands collectionneurs d'art surréaliste européen, propose de créer une fondation, dans un hôtel particulier du Marais, à Paris. Le projet avorte, faute de crédits pour payer les frais de fonctionnement. Et puis les héritiers commencent à douter, après les remous judiciaires autour des fondations Vasarely, Arp ou Giacometti. La dernière proposition sérieuse émane de François Pinault. Au cours d'une visite au 42, rue Fontaine, voilà trois ans, le propriétaire du Printemps propose à Elisa rien de moins que de racheter la totalité de la collection. Il souhaite l'intégrer à son projet de musée sur l'île Seguin, dans les anciennes usines Renault. Là encore, la veuve d'André Breton, décidément très prudente, refuse, craignant, semble-t-il, que Pinault, propriétaire de Christie's, ne soit tenté de revendre plus tard une partie des pièces via cette salle des ventes plus british que Drouot.

Quel est le prix du merveilleux? A la mort d'Elisa, en 2000, Aube hérite donc de la collection. A 67 ans, cette ancienne assistante sociale, également reconnue dans le milieu de l'art pour ses collages, s'entoure d'experts et entame l'inventaire de ce précieux capharnaüm. "J'ai découvert des chefs-d'oeuvre sous le canapé ou dans des cartons, sourit le grand expert du surréalisme Marcel Fleiss. J'ai par exemple retrouvé, roulée sur la mezzanine, une toile de Mallo que l'on croyait disparue depuis 1936. La partie visible à l'?il nu ne représentait peut-être qu'un dixième de la collection." En affinant son expertise en vue de la vente, Marcel Fleiss aura la surprise de détecter trois faux, lesquels auraient donc abusé l'un des plus clairvoyants esthètes du siècle: une aquarelle de Rodin, un Douanier Rousseau et Jupiter et Sémélé, de Gustave Moreau. Ils seront évidemment proposés à la vente en tant que tels. L'un des chefs-d'oeuvre de la collection, La Femme cachée, de Magritte, présente, elle, quelques craquelures, André Breton ayant eu un jour l'idée saugrenue de la savonner pour lui redonner son lustre. Estimation: entre 500 000 et 800 000 euros tout de même...
Quant aux tiroirs, ils regorgent de photos d'époque. "Il y avait des albums de photos comme chez n'importe qui, sauf que les amis qui y figuraient étaient Tristan Tzara et Paul Eluard et que le photographe s'appelait Man Ray", s'amuse l'expert David Fleiss. Certaines de ces photos de famille, souvent annotées de la main de l'artiste, sont estimées à plus de 20 000 euros aujourd'hui. L'expert a également exhumé des dizaines de Photomaton de Breton, Max Ernst, Tanguy... Ils seront proposés par lots de 10 à la vente, aux alentours de 500 euros
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De son côté, l'expert Alain de Monbrison se perd dans la jungle de statuettes océaniennes, amérindiennes ou africaines. Une statue Uli de Nouvelle-Irlande, haute de 1,20 mètre (estimée à 600 000 euros), voisine, en un joyeux télescopage, avec des poupées Kachina des Hopi d'Arizona, des fétiches de Nouvelle-Guinée ou un masque esquimau d'Akasta (le Soleil) ceint de huit plumes (125 000 euros). Doté d'un goût très sûr et souvent avant-gardiste, Breton a acheté nombre de ces chefs-d'oeuvre pendant la guerre au musée Haye de New York, avec Claude Lévi-Strauss (qui a d'ailleurs tenu à manifester son soutien à la vente, dans une récente lettre à Aube).

Mais la tâche la plus surréaliste revient à Henri-Claude Randier, à qui il appartient d'expertiser, notamment, les moules à gaufre, les bénitiers, les cannes de poilus, les coquillages du poète, etc. "Combien vaut la boule de voyante? La courbe démographique de la Suède en trois dimensions sous verre? Un fossile d'oursin? Autant se demander quel est le prix du merveilleux", lâche l'expert, amusé et perplexe...

Et puis, il y a la bibliothèque... "Tous les auteurs qui ont compté au XXe siècle lui ont envoyé leurs oeuvres dédicacées, de Freud à Gracq, d'Apollinaire à Miller", détaille l'expert Claude Oterelo. Des murs de livres, rangés sur deux épaisseurs, classés par thème (les utopistes, les romans noirs, les pamphlets contre Staline...) et souvent frappés de son ex-libris (un tamanoir gravé par Dali). Entre Qu'est-ce que le surréalisme?, de Breton lui-même, illustré d'une gouache de Magritte (estimation: 125 000 euros) et des éditions originales de Rimbaud ou de Lewis Carroll, l'expert a eu la surprise amusée de tomber sur Arrête ton char, Ben Hur!, respectueusement dédicacé au père du surréalisme par l'auteur de polars Ange Bastiani...

Un véritable casse-tête pour les fonctionnaires de Bercy. Mais l'émerveillement suscité par l'inventaire cède vite la place à des considérations plus terre à terre: le calcul des droits de succession à l'Etat. Pour perpétuer l'esprit du 42, rue Fontaine, Aube tient à offrir en dation au musée d'Art moderne du Centre Pompidou non quelques ?uvres disparates mais... un pan entier de mur. Elle choisit le fameux mur situé derrière le bureau de son père, véritable ?uvre d'art mouvante, modifiée au gré des engouements et des acquisitions. On peut y découvrir, autour d'un portrait d'Elisa, une tête signée Miro, LHOOQ, de Francis Picabia, des masques précolombiens, mais aussi des objets trouvés, une racine, des minéraux... Un véritable casse-tête pour les fonctionnaires de Bercy chargés d'évaluer ce patchwork dada. A combien estimer, par exemple, une pierre ramassée à Saint-Cirq-Lapopie (Lot), dédicacée à Elisa avec cette inscription: "Souvenir du Paradis terrestre"?

Les négociations s'engagent avec Laurent Fabius, alors ministre des Finances, avant d'être momentanément gelées à cause de l'élection présidentielle. Il y a quelques semaines, Bercy a même dû affréter un avion spécial pour permettre à ses experts d'examiner le fameux mur dans un musée de Düsseldorf, où il est actuellement exposé. Longtemps, les hommes de Bercy, perplexes, se sont interrogés sur la valeur réelle de telle racine, de tel minéral... La dation a finalement été conclue le 13 février. Aube devrait, par ailleurs, offrir la Danseuse espagnole, de Miro, un Matta et un Brauner à Beaubourg, et quelques statues et masques au futur musée des arts premiers du quai Branly.
La totalité des autres pièces sera vendue à Drouot. Pendant des semaines, des camions blindés ont convoyé ces milliers de trésors du 42, rue Fontaine en Mayenne, où ils ont été numérisés en vue du DVD. Puis, une fois expertisés, toiles, sculptures, livres et manuscrits rejoignent les hangars d'un transitaire parisien, en attendant la vente. "D'une certaine manière, en passant à Drouot, ces objets retournent un peu à leur origine, explique la commissaire-priseur Laurence Calmels, répondant ainsi implicitement aux opposants à la vente. Sa vie durant, Breton a chiné, acheté, revendu. Il a lui-même organisé de célèbres enchères à Drouot, notamment en 1931, avec Eluard."

Le fondateur du surréalisme, dont les droits d'auteur sont demeurés dérisoires jusqu'à la parution de Nadja en poche, a d'ailleurs vécu de son goût pour l'art: lorsqu'il se fâche avec Aragon, il file chez un bouquiniste vendre les tirages de luxe de son ancien ami (mais en oublie deux, que l'on retrouvera à la vente); pour financer les vacances de sa fille, il se défait, non sans douleur, d'un dessin de Magritte ou d'une statuette de Colombie-Britannique. Ce n'est qu'en 1964, avec la vente au Moderna Museet de Stockholm, pour 250 000 F, du Cerveau de l'Enfant, un splendide De Chirico, qu'il se met définitivement à l'abri du besoin. Qui aurait pu imaginer que sa quête inlassable du rêve et de la beauté allait, quarante ans plus tard, se transfigurer en centaines de millions de francs sous les coups de marteau de deux commissaires-priseurs? Peut-être le poète lui-même, qui, expert en prémonition, avait laissé graver en épitaphe sur sa tombe: "Je cherche l'or du temps" ...

(1) Les huit catalogues sous coffret avec le DVD (280 euros) et le DVD seul (50 euros) peuvent être commandés sur le site calmelscohen.com. "

Par Jérôme Dupuis et , publié le




 
MUR ANDRE BRETON AU CENTRE POMPIDOU
 
 
Derrière son bureau, Breton a rassemblé, pêle-mêle œuvres d’art, masques, insectes, cailloux, objets trouvés... Cette collection est un pied de nez à la logique des musées. Ici, pas de hiérarchie : l’arbitraire marie les 212 objets. À l’instar du surréalisme, le but est de créer une étincelle poétique par des contrastes percutants.
Le choix d’une majorité d’œuvres d’art dit « primitif » souligne la remise en cause des valeurs esthétiques mais aussi culturelles de l’Occident.
Les grandes toiles du fond résument l’évolution du mouvement. Le Double Monde de Francis Picabia, Tête de Joan Miró et Le Pollen noir de Jean Degottex évoquent les accointances avec Dada, l’âge d’or et enfin l’après-guerre.







MAX ERNST / LA FEMME CENT TETES (1929) III

 
 
 
 

 
 

 
 

 
 

 
 

 
 

 
 

 
 
 
 

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